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18ème édition des Journées Internationales de Sociologie du Travail (JIST)

1er au 3 juillet 2024

Évry, France

 

 

Appel à communications

« Organiser, désorganiser, réorganiser le travail »

 

Historiquement, la sociologie du travail s’est construite à partir d’une réflexion sur différentes dimensions de l’organisation, comprenant les structures dans lesquelles le travail se déroule et les processus organisateurs de l’exploitation de la force de travail. La discipline a d’emblée porté un regard critique sur l’organisation dite scientifique du travail, élaborée par F. W. Taylor. En parallèle, elle s’est interrogée sur l’organisation des rapports sociaux de production, en se focalisant sur le salariat, tant comme forme contractuelle d’échange entre travailleurs, travailleuses et employeurs, employeuses que comme espace de structuration des conflits et des négociations. Notamment à partir de la seconde moitié des années 1970, elle s’est également intéressée aux questions d’emploi, de chômage, de précarité et de sous-emploi, dans un contexte marqué par l’émergence des transformations majeures des statuts d’emploi et des usages de la main-d’œuvre, qu’elle soit salariée, indépendante ou informelle (bénévolat, travail reproductif ou domestique, etc.).

Après l’édition 2018 des JIST, centrée sur la question des luttes, cinquante ans après le mouvement de mai 1968, et dans la foulée de l’édition 2021, qui interrogeait les brouillages des frontières du travail, l’édition 2024 offre l’occasion de revenir sur les processus d’organisation, de désorganisation et de réorganisation du travail qui sont à l’œuvre depuis plusieurs décennies et qui se sont probablement intensifiés, sous l’effet de différentes crises financières, sanitaires, environnementales… À quelles organisations/désorganisations/réorganisations assiste-t-on ? Quels acteurs politiques, sociaux, économiques y contribuent-ils ? Avec quels effets sur les fonctionnements systémiques et sur les individus et les collectifs au travail, en emploi ou aux marges du marché du travail ?

La thématique de ces Journées internationales de sociologie du travail se déclinera en cinq axes qui donneront lieu à des sessions avec communications et discussions, parallèlement aux séances plénières et aux tables rondes.

                         

Axe 1 | Permanence et reconfiguration des rapports sociaux dans l’organisation, la désorganisation et la réorganisation du travail

Le travail et l’emploi sont des sphères d’expression, de production, d’actualisation et de subversion des rapports sociaux (qu’ils soient de classe, d’âge, de genre, de racisation, etc.) Les communications pourront se centrer sur la permanence et la reconfiguration des rapports sociaux qui traversent les mondes du travail, les secteurs spécifiques d’activité, les organisations publiques et privées et les groupes professionnels, en France ou ailleurs. Il s’agit de s’intéresser à la manière dont les rapports sociaux, qui structurent l’ensemble du monde social, prennent racine dans le champ du travail, sous l’effet des reconfigurations productives contemporaines. Les évolutions de l’organisation du travail et du management, ainsi que les situations, durables pour certaines parties de la population, de chômage, de sous-emploi et de précarité modèlent, en effet, les formes de solidarité, tout comme la nature et l’étendue de la domination sociale. On pourra, par exemple, interroger la manière dont la permanence et la reconfiguration de ces rapports sociaux révèlent de nouvelles formes de travail ou d’emploi dévalorisé, dégradé voire gratuit ou quasi-gratuit et invisibilisé (travail domestique et reproductif, travail bénévole, travail informel, travail des client·es, stages, etc.). Quels effets ont les grands changements sociodémographiques, tels que le vieillissement de la population, la salarisation massive des femmes ou l’allongement de la phase d’insertion entre la fin de la formation initiale et la stabilisation dans un emploi, sur la structure du système d’emploi et les divers rapports sociaux ? Dans quelle mesure les mobilisations sociales (autour des enjeux économiques, anticapitalistes, environnementaux, anticonsuméristes, féministes, antiracistes ou LGBTQI+), qui cherchent à peser sur lesdits rapports sociaux, transforment-elles les organisations du travail ? Dans quelle mesure ces mobilisations sociales sont-elles détournées ou contournées pour reproduire l’exploitation et la domination ? Dans quelle mesure les approches féministes, antiracistes, décoloniales ou écologistes reconfigurent-elles les termes des mobilisations liées au travail dans différents contextes sociétaux ou sociohistoriques ?

 

Axe 2 |  Ce que le numérique et la digitalisation font à l’organisation, la désorganisation et la réorganisation du travail

Capitalisme de plateforme, ubérisation de l’économie, digital labor, travail sous algorithme, ubérisation de l’emploi dans le contexte d’une économie mondialisée interconnectée sont de nombreux termes utilisés pour décrire les mutations des conditions d’emploi et de travail. Ces mutations concernent le poids croissant du numérique, dans le contenu du travail, dans son organisation et dans sa durée effective, avec les débordements sur le temps personnel et familial. Le développement à travers le monde d’un « capitalisme de plateforme » est accentué, notamment depuis la crise sanitaire, par l’amplification du recours au télétravail, qui constitue une nouvelle dimension de la numérisation au travail, de la flexibilisation du travail, du brouillage des frontières temps de travail/vie personnelle et de la transformation des relations sociales dans l’emploi. Il s’agit d’explorer l’ambivalence des outils numériques, qui peuvent être à la fois des facteurs d’accroissement d’autonomie au travail, mais aussi d’intensification du travail et de renforcement du contrôle.

Cet axe interrogera principalement le développement des plateformes numériques comme nouvel espace de travail : quels sont les impacts des plateformes numériques sur le travail, sur les métiers, mais aussi sur l’emploi et sur la protection sociale ? Quelles identités et quelles identifications au travail construisent les travailleurs ubérisés ? Quelles nouvelles formes prend le management à l’ère du télétravail et de l’omniprésence des algorithmes et des DATA ? Quelles désorganisations/réorganisations des collectifs de travail produisent-elles ?

Par ailleurs, cet axe questionnera l’impact de technologies récentes, et notamment des intelligences artificielles : quelles sont les perceptions de ces nouveaux outils par les travailleurs et travailleuses ? Quelles formes d’adhésion ou de résistance construisent-elles au travail ? Quels sont les enjeux spécifiques de la digitalisation des tâches pour les travailleurs et travailleuses peu qualifié·es, potentiellement appelé·es à s’adapter à ces innovations technologiques, tant dans les pays du Nord global, dont les entreprises délocalisent une partie de ces activités, que dans les pays qui accueillent ces emplois délocalisés ? Enfin, comment les individus et les collectifs de travail s’approprient-ils les outils numériques avec lesquels ils travaillent et avec quelles visées ? 

 

Axe 3 | Ce que les mobilisations collectives et individuelles font à l’organisation, la désorganisation et la réorganisation du travail dans le contexte de mutation du travail et de l’emploi

Cet axe ambitionne d’aborder les différents temps des mobilisations, dans leurs successions comme dans leurs contenus, des événements déclencheurs jusqu’aux finalités poursuivies et leurs impacts ultérieurs sur l’organisation, la désorganisation et la réorganisation du travail. Les contributions attendues permettront d’avoir un aperçu des différents motifs de mobilisation, que ceux-ci consistent en actions défensives contre des projets ou des décisions de l’État ou des organisations ou qu’il s’agisse de revendications offensives portées par les salariés, les syndicats ou d’autres acteurs collectifs.

Il sera intéressant de questionner les conditions nationales, transnationales, sociales, juridiques et organisationnelles qui permettent l’émergence de mobilisations dans le travail ou à son sujet, ainsi que les acteurs, les actrices et supports qui influencent leur agencement. Une attention pourra être portée à l’évolution des dispositifs juridiques qui encadrent l’action collective – par exemple, pour ce qui est de la France, la profonde évolution des dispositifs de représentation des intérêts des salariés (évolution des règles de représentativité en 2008 et fusion des Institutions Représentatives du Personnel au sein du CSE en 2020).

Les communications pourront s’intéresser aux modalités d’organisation (coordinations « autonomes », syndicales ou inter-syndicales, collectifs solidaires, réseaux de sympathisants, etc.), de délibération et de prise de décisions, en montrant les potentielles difficultés d’association liées aux positions sociales multiples (profession, fonction, statut, genre, âge, etc.), aux points de vue différents.

On pourra également s’intéresser aux rencontres entre mouvements sociaux directement liés au travail ou à l’emploi et des mouvements et associations prioritairement centrés sur des enjeux environnementaux, féministes ou antiracistes, à une échelle nationale ou transnationale.

Les contributions pourront également mettre en exergue les affects, désirs et énoncés moraux que suscitent les évolutions du travail, ainsi que les réformes et contre-réformes touchant au social, à l’économique, à l’environnement mises en œuvre par les pouvoirs publics, en France comme dans d’autres pays.

Enfin, on pourra analyser / étudier les discours et dispositifs dans les entreprises privées comme dans le secteur public qui incitent à un autre type de mobilisation des salarié·es, mais aussi des sous-traitants juridiquement indépendants, mais économiquement dépendants, par le biais de « nouvelles » méthodes d’organisation du travail ou de « nouveaux » dispositifs de mise au travail.

 

Axe 4 | Ce que les politiques publiques font à l’organisation, la désorganisation et la réorganisation du travail

Cet axe s’intéressera aux actions et orientations relevant des politiques publiques qui contribuent à la construction/déconstruction/reconstruction des relations au travail et à l’emploi, à l’échelle nationale ou transnationale. Comment les choix politiques font-ils évoluer le fonctionnement du travail et de l’emploi, et transforment-ils le rapport au travail des personnes considérées comme actives, demandeuses d’emploi ou inactives? Quels effets les politiques de l’emploi produisent-elles sur le système d’emploi, sur les modalités de recrutement et de gestion de la main-d’œuvre salariée ou non, sur l’activité des professionnels de son accompagnement et sur la situation et les représentations des publics concernés ? Quels impacts les réformes récentes ou en cours ont-elles sur les trajectoires, les parcours et les carrières ? En France, il s’agit de s’intéresser notamment aux réformes de la formation professionnelle, de l’assurance chômage et du système de retraite, au remplacement de Pôle Emploi par France Travail, aux contraintes renforcées sur les ayant-droits au RSA. Dans d’autres pays, il s’agit d’analyser des réformes comparables ou contrastées. Quelles réponses ont été mises en place pour combattre ces réformes, s’y adapter ou pour les contourner individuellement et collectivement ? Comment ces réformes ont-elles modifié les organisations du travail, les configurations d’emploi, de sous-emploi et de chômage (qu’il soit comptabilisé ou non), la place du travail informel, les pratiques managériales, les rapports de genre, les rapports de classe et les droits sociaux des uns, des unes et des autres ? Dans quelles visions de la société, du travail, de l’emploi, du chômage et de la santé, ces politiques publiques s’inscrivent-elles? Que produisent les politiques publiques et la rhétorique qui les accompagne sur la place du travail, le rapport au travail, le sens du travail, la santé au travail ? Quels sont leurs effets sur les employeurs et employeuses, les salarié·es, les hors-statuts aux marges du système d’emploi (précaires, jeunes et moins jeunes enfermé·es dans divers dispositifs d’insertion, pseudo-indépendants, etc.), les demandeurs et demandeuses d’emploi et les professionnel·les de l’insertion professionnelle ? Dans quelle mesure influencent-elles les politiques publiques dans d’autres domaines et les stratégies syndicales ?

 

Axe 5 | Ce que les « crises » font à l’organisation, la désorganisation et la réorganisation du travail

Le monde du travail connaît des évolutions permanentes et complexes, qui tendent à s’accélérer dans de très nombreux espaces territoriaux, à des échelles locale, nationale, européenne ou mondiale. L’environnement des organisations devient davantage volatil, insaisissable, à la fois dans leurs structures de financement, de production et d’organisation du travail (par exemple, l’essor du télétravail ou du flex-office qui sont susceptibles d’alimenter des logiques d’isolement et/ou de « nomadisme » des travailleurs et travailleuses et la déstructuration des collectifs de travail). Ces transformations, perçues comme brusques par nombre de travailleur·ses marquent des ruptures (ou « crises »), à la fois sociales, financières et environnementales qui concernent tous les types d’organisation. Dans une perspective plus spécifique, il serait également judicieux de s’intéresser à une « crise du sens du travail », qui serait, à certains égards, comparable à celle des années 1960-70.

On peut se demander comment dans ce contexte les organisations publiques et privées se réorganisent pour poursuivre leurs activités de production et maintenir les dynamiques professionnelles à l’œuvre ? Quels effets cela produit-il sur la santé psychique des salariés pour qui le travail apparaît de plus en plus insoutenable ? Parallèlement, ces « crises » offrent l’occasion d’accroître l’adaptabilité et la réactivité des travailleurs et travailleuses et d’introduire de nouvelles normes sociales, de pratiques professionnelles ou managériales, de reconstruction des réseaux professionnels et d’expérimentation d’organisations alternatives du travail (Fablabs, initiatives relevant de l’économie sociale et solidaire, etc.).

Cet axe ouvre diverses interrogations. D’une part, quelles conséquences ces « crises » ont-elles sur les activités de production, sur le travail lui-même, l’organisation des collectifs de travail, leur identité, leurs relations et leurs pratiques, mais aussi sur la perception que les travailleurs et les travailleuses peuvent avoir de leur travail ? D’autre part, cet axe est l’occasion de questionner la notion de « crise » et les sens dont elle est investie selon les acteurs qui la mobilisent. Enfin, ces questionnements peuvent porter sur le traitement médiatique des « crises » (par la sphère scientifique, politique ou gestionnaire, dans les arènes publiques), notamment la façon dont les questions sur le travail alimentent les discours sur la crise et inversement.

Il est ainsi possible d’interroger les rapports entre crises et organisation, désorganisation, réorganisation du travail : les crises manifestent-elles une intensification des dynamiques de transformation ou sont-elles à l’origine de leur accélération ?

 

Propositions de communication

Les contributeurs et contributrices sont encouragé·es à s’appuyer sur des données empiriques, même si des propositions purement théoriques peuvent également être soumises. Il est tout à fait possible de mobiliser les méthodes de la sociologie visuelle, en s’appuyant sur des méthodes photographiques, filmiques ou autres. Seront notamment accueillies avec intérêt les communications proposant de nouveaux regards, méthodes, théories, récits et écritures.

S’agissant des journées internationales de sociologie du travail, les perspectives incluant des comparaisons internationales et les propositions portant sur des terrains d’enquêtes hors de la France seront particulièrement bienvenues. Enfin, seront aussi appréciées les propositions qui analysent, dans une perspective intersectionnelle, la façon dont s’articulent empiriquement les rapports de classe, de genre, d’âge, de sexualité et de racisation dans l’organisation, la désorganisation et la réorganisation du travail.

 

La proposition de communication doit comporter 2 500 signes maximum (espaces compris) et présenter la problématique, le cadre théorique, la nature des supports empiriques et les principaux résultats.

Le résumé, rédigé en français, en espagnol ou en anglais, en évitant le ‘masculin neutre’[1] est à déposer sur la plateforme Sciencesconf.

Ce dépôt nécessite au préalable la création d’un compte sur la plate-forme : https://portal.sciencesconf.org/user/createaccount

Vous pourrez ensuite procéder au dépôt de votre proposition de communication en vous connectant au site des JIST, https://jist2024.sciencesconf.org, dans la rubrique Dépôts/Déposer un résumé et en recopiant votre texte rédigé dans le cadre prévu.

 

Si besoin, une notice « Aide au dépôt des résumés » vous est proposée.

 

 


[1] Pour cela, se référer par exemple à la rubrique « Conseils aux auteurs et autrices : Écriture inclusive » de la revue Sociologie du Travail

 

 

 

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